Selon une étude réalisée en juin 2022 par OpinionWay auprès de 300 enseignants duprimaire et du secondaire et dévoilée lors du salon Educ@tech, 80 % des sondés sont préoccupés quant aux pratiques des élèves dans l’univers numérique. Ils estiment, en outre, être peu accompagnés pour y remédier. Les éclairages de l’ARCOM, de la CNIL et du Défenseur des droits.

« Enseignants et citoyenneté numérique : quels leviers d’enseignement ? » C’est le thème qui a été au cœur d’une conférence tenue mercredi 30 novembre dans le cadre du salon Educ@tech, à Paris. La question de savoir comment des thématiques liées à une pratique responsable du numérique peuvent être abordées en classe est d’autant plus importante que 80 % des enseignants semblent « préoccupés » au sujet des usages de leurs élèves, selon une étude commandée à OpinionWay par l’ARCOM (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique), la CNIL et le Défenseur des droits. Pour Manon Conan, cheffe du département éducation aux médias et sensibilisation au droit d’auteur à l’ARCOM, « les enseignants sont catastrophés par l’absence d’esprit critique de leurs élèves vis-à-vis des informations diffusées sur les plateformes en ligne, les réseaux sociaux et les médias audiovisuels. Pour eux, il devient urgent de les former sur ces questions ».

Un manque de formation

Problème : les enseignants déplorent un manque de formation et d’accompagnement sur ces questions. C’est en tout cas la raison principale qu’ils avancent pour justifier le fait qu’ils ne consacrent, en moyenne, que 3 heures par trimestre à l’enseignement des principes de la citoyenneté numérique. Dans l’étude, les professeurs expriment le besoin de disposer de supports pédagogiques dédiés. Par ailleurs, ils souhaiteraient (plus de 58 %) bénéficier de l’accompagnement de structures institutionnelles comme l’ARCOM ou encore la CNIL.Consciente de cette forte demande, cette dernière fait de l’éducation au numérique une priorité stratégique depuis une dizaine d’années. « Nous produisons des ressources à destination des enseignants et des parents d’élèves et nous menons des campagnes de sensibilisation sur des questions comme la vigilance sur Internet et le cyber-harcèlement », indique ainsi Carina Chatain, responsable Éducation numérique à la CNIL.

Les enseignants en quête de ressources adaptées

Pour les enseignants, la lutte contre le cyber-harcèlement (68 %), la liberté d’expression et ses limites (50%) et le regard critique sur les sources d’information (50 %) arrivent en tête des problématiques auxquelles ils souhaitent sensibiliser les jeunes. Viennent ensuite la prévention contre l’exposition à des contenus choquants (49 %) et la protection des données personnelles (43 %). Parce qu’ils sont complexes à aborder en classe, ces sujets nécessitent des supports pédagogiques adaptés. Outre la CNIL, dont certains contenus sont mis à disposition sur la plateforme M@gistère, l’ARCOM et le Défenseur des droits mettent à disposition des ressources pédagogiques à destination des enseignants. « Nous avons développé plusieurs modules et fiches pédagogiques traitant de liberté d’expression, de l’enjeu de la construction de l’information, de la pluralité des points de vue », souligneManon Conan.

Des jeunes confrontés aux dangers d’Internet

La CNIL produit également des vidéos de cas d’usage visant à sensibiliser au traçage, à initier les jeunes à la gestion des cookies, etc. « Nous avons choisi de nous adresser aux jeunes avant même leur entrée au collège car ils sont de plus en plus nombreux à être déjà sur Internet avant l’âge de 13 ans. Ces enfants sont en lien avec des inconnus sur Internet, donc potentiellement confrontés à des formes de cyber-violence, à l’exploitation commerciale de leurs données, au piratage, à l’usurpation d’identité… Il devient urgent de les accompagner pour qu’ils deviennent des citoyens numériques », souligne-t-elle. Selon elle, un équilibre reste toutefois à trouver entre le renforcement de la protection de l’enfance et le respect de la vie privée de l’enfant, qui doit pouvoir développer son autonomie sans être surveillé en permanence. Encore faut-il que les élèves prennent davantage conscience de leurs propresdroits (seuls 20 % des lycéens les connaissent). Dans ce cadre, le Défenseur des droits mène des actions de promotion via son programme « Educadroit ». « Il s’agit également de donner des ressources aux éducateurs (enseignants, parents, professionnels) et de favoriser l’esprit critique des jeunes afin qu’ils se saisissent de leurs droits », explique Victoria Pla, chargée de mission éducation au droit auprès du Défenseur des droits.