Face à une pénurie croissante de talents dans des secteurs clés tels que le numérique, l’industrie ou la restauration, la France est confrontée à un défi majeur : celui de former une main-d’œuvre suffisamment qualifiée pour répondre aux besoins du marché. Par ailleurs, des phénomènes tels que la fuite des cerveaux viennent exacerber cette problématique.

Pourtant, un indicateur suscite un certain optimisme : en 2025, le classement Times Higher Education (THE) place la France au deuxième rang mondial pour l’employabilité de ses diplômés universitaires. Cette réussite s’explique par des partenariats stratégiques entre universités et grandes entreprises et par l’émergence de cursus spécialisés dans des domaines d’avenir comme la cybersécurité, l’intelligence artificielle… Ce succès révèle un enjeu fondamental : l’importance de l’adéquation entre les compétences enseignées pendant le cursus scolaire et les besoins du marché. C’est là qu’intervient le rôle stratégique de la collaboration entre les acteurs du système éducatif et économique.

Trois bénéfices majeurs du partage de données de compétences

En croisant les informations sur les aspirations des étudiants, leurs performances académiques et les tendances économiques, il devient possible de répondre aux enjeux actuels de l’employabilité mais surtout d’améliorer le système éducatif. N’oublions pas que la France se classe 26ème des pays en termes de niveau des élèves, avec une réelle baisse de niveau en mathématiques. Cette solution repose notamment sur l’interconnection entre institutions éducatives, entreprises et plateformes d’emploi. Au plus ces acteurs collaborent pour partager, analyser et utiliser ces données, au plus les recommandations proposées gagnent en pertinence et en précision. Il devient alors possible de :

1. Reconnaître des points faibles de l’élève

En exploitant les données partagées entre les institutions éducatives et les plateformes numériques, il devient possible d’identifier rapidement les faiblesses spécifiques à chaque élève, qu’il s’agisse de compétences académiques, de méthodes de travail ou de lacunes particulières. Ces informations permettent aux institutions éducatives de proposer des supports ciblés et des outils adaptés comme des tutorats, des ressources pédagogiques personnalisées ou des séances de rattrapage. En offrant un accompagnement individualisé, le partage de données contribue non seulement à améliorer la réussite scolaire – en comblant les lacunes dès qu’elles sont détectées – mais également à renforcer la confiance des élèves en leurs capacités. 

2. Identifier les écarts entre les formations proposées par les établissements scolaires et le marché de l’emploi

L’un des défis majeurs du système éducatif réside dans son alignement avec les besoins réels du marché du travail. Le partage des données de compétences permet de croiser les attentes des entreprises avec les parcours d’apprentissage proposés par les institutions scolaires. Cette collaboration entre les parties prenantes permet aux établissements scolaires de mettre en place des solutions adaptées, d’ajuster les programmes de formation, de proposer des formations spécifiques, de personnaliser les parcours d’apprentissage ou encore faciliter l’accès des étudiants à des stages et des alternances. Ce processus garantit une meilleure adéquation entre les formations et les besoins économiques en faveur d’une insertion professionnelle rapide.

3.Améliorer l’orientation pour des parcours mieux adaptés


Le partage de données joue également un rôle essentiel dans l’orientation des étudiants. En croisant leurs aspirations, leurs compétences et les besoins du marché, les institutions peuvent fournir à ces derniers des recommandations précises et pertinentes sur les filières ou métiers qui leurs correspondent. Cette approche limite les erreurs d’orientation et maximise les chances de succès, en orientant les étudiants vers des carrières où ils pourront s’épanouir tout en répondant aux attentes des entreprises.

Un chemin semé d’embûches

En plaçant la collaboration et le partage de données au cœur de l’éducation, il devient possible de transformer le système actuel pour le rendre plus adapté, précis et efficace. Grâce à une reconnaissance fine des besoins des élèves, à une meilleure adéquation entre formations et attentes du marché, et à une orientation optimisée, la France peut bâtir un modèle éducatif à la fois innovant et inclusif.

Pourtant, malgré ces opportunités, le chemin vers un système éducatif pleinement adapté reste semé d’embûches. Les silos qui cloisonnent les institutions éducatives, les entreprises et les plateformes d’emploi complexifient le partage et l’utilisation des données. Ce manque de fluidité freine non seulement la collaboration, mais limite aussi la capacité à proposer des solutions réellement adaptées aux besoins des élèves et du marché. Réduire ces barrières est une étape essentielle pour instaurer un système interconnecté et efficace.

Positionner la France comme un modèle d’éducation

Des initiatives telles que le Skills Data Space, porté par Prometheus-x, illustrent comment un cadre sécurisé et collaboratif peut réunir les acteurs publics et privés pour réduire les silos et proposer des solutions à la fois adaptées et innovantes.

Ce modèle collaboratif offre également une réponse concrète à la fuite des cerveaux, un phénomène qui affaiblit le potentiel économique et intellectuel du pays. Nous pourrions mieux valoriser les entreprises locales par rapport aux compétences de chacun, plutôt que nos jeunes soient persuadés que seuls les géants étrangers offrent des expériences enrichissantes. Parallèlement, nous adresserons le problème de la pénurie des cerveaux : les entreprises technologiques ne trouvent pas aujourd’hui sur le marché français les compétences dont elles ont besoin, le skills data space permet une meilleure adéquation. En répondant efficacement aux attentes des étudiants et des employeurs, un système fondé sur la collaboration et le partage de données de compétences ne se limite pas à transformer l’éducation. Il positionne la France comme un modèle d’innovation et de collaboration à l’échelle mondiale, renforçant son économie et son attractivité de manière durable.

 

Par Matthias De Bièvre, CEO de VISIONS

A propos de l’auteur :

Matthias De Bièvre est diplômé d’un Master Communication Politique & Lobbying à Sciences Po Paris. Il a étudié de nombreux domaines dont la communication, la science politique et l’informatique. Après différentes expériences dans la gouvernance des données, il a fondé Visions dont il est aujourd’hui le CEO. En parallèle, il pilote la Skills Alliance et intervient régulièrement dans des conférences sur la portabilité des données en Europe, aux États-Unis et au Moyen Orient. Il est également membre du conseil d’administration de PrivacyTech et membre fondateur de Institute for Digital Fundamental Rights ainsi que Président de Prometheus-X.