« Le niveau de réussite de nos étudiants est le même en digital et en présentiel »

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Lorsqu’il a pris ses fonctions de président d’Epitech en mars 2013, Emmanuel Carli s’est donné pour objectif d’accélérer la digitalisation des pratiques de l’école informatique. Un chantier de longue haleine qui permet aujourd’hui à son équipe pédagogique de bien affronter la crise du Covid-19, notamment de digitaliser son événement phare « Epitech Experience » et ses journées portes ouvertes.

 La crise du Covid-19 a accéléré l’usage de solutions digitales par les établissements d’enseignement supérieurs. Comment avez-vous vécu cette période ?

 Nous avons certainement eu plus de facilité à se projeter dans un monde tout digital que certaines écoles, simplement parce que nous n’avons pas attendu la crise pour digitaliser nos pratiques pédagogiques. Nous avons débuté notre digitalisation dès 2014, en permettant à nos étudiants de suivre leurs cours via la plateforme Microsoft Teams. Lorsque le confinement est entré en vigueur, nous étions déjà rompus à l’exercice du travail à distance. Par ailleurs, puisque nous avions des étudiants en Chine, nous avons pu anticiper la crise dès le mois de décembre 2019. Nous avons réalisé un audit de notre système, qui nous a permis de basculer nos derniers fichiers dans le cloud. Nous avons également fait un test « grandeur nature » dont la règle était : confiner Epitech pendant 3 jours.

Qu’est-ce que les confinements successifs ont changé pour vous ?

Depuis le début de la crise, tous les cours ont été assurés via Teams. Nous n’avons pas eu besoin de développer d’outil spécifique pour faire face aux confinements. Ce qui a changé, c’est le process des équipes pédagogiques, plus particulièrement le suivi journalier des étudiants et la vérification de leurs collaborations aux travaux demandés. Puisque cette mission ne pouvait plus se dérouler en présentiel, nous l’avons, elle aussi, basculée sur Teams. Nos professeurs réalisent donc la correction de projets à distance, grâce à un outil dédié. Ce qui nous a rassuré au fil des mois, c’est que le niveau de réussite de nos étudiants est le même que lorsque les enseignements sont menés en présentiel. Nous constatons toutefois que l’effort est plus difficile pour eux.

Comment votre équipe pédagogique vit-elle cette période ?

Elle ne rencontre pas de difficultés particulières et est même partie prenante dans nos nouvelles manières de travailler. Le plus gros problème des écoles aujourd’hui, ce n’est pas de choisir les bons outils pour assurer la continuité pédagogique, mais de changer leurs habitudes. C’est donc à la dimension humaine qu’il faut être vigilant. La différence majeure avec les autres écoles, c’est que nous n’avons pas vécu la digitalisation à marche forcée. Depuis 2014, nous avons eu le temps de changer nos habitudes. Au début, sur Teams, nous nous organisions très mal et le flux d’informations était trop important. Avant de prendre nos repères, il nous a fallu beaucoup d’itérations, que les autres écoles n’ont malheureusement pas pu faire ces derniers mois.

Et vos étudiants ?

Ce qu’il faut savoir, c’est que la pédagogie de notre école est inversée. Nous ne voulons pas que nos étudiants viennent coûte que coûte dans nos salles de classe. Nous préférons qu’ils gagnent en autonomie. Lorsque le premier confinement a été décidé en mars 2020, nos étudiants avaient déjà fait l’apprentissage de cette autonomie au cours de leur premier semestre. Ils avaient déjà expérimenté le travail à distance. La difficulté a plutôt été d’accompagner la promotion d’étudiants de première année qui ont débuté en septembre 2020, en pleine pandémie. Heureusement, ils ont pu vivre l’épreuve de la piscine, qui leur a permis de tisser des liens entre eux. Juste avant le 2e confinement, nous avons « splité » la promotion en quatre groupes et organisé des rotations afin qu’ils puissent suivre leurs cours en présentiel, à tour de rôle. L’état mental de nos étudiants était déjà notre préoccupation.

Comment avez-vous digitalisé l’événement « Epitech Experience », qui se déroule cette semaine ?

La difficulté, c’est que cet événement avait une composante physique forte puisqu’il était jusqu’ici organisé sous notre campus, dans un espace de 2000 m2 qu’on réorganisait pour accueillir 1000 personnes. Pour organiser notre concours « Epitech Innovative Project », qui récompense les projets qui ont une vocation entrepreneuriale, nous nous sommes outillés d’une plateforme de crowdfunding. Cette année, elle met à l’honneur 122 projets d’étudiants. En digitalisant ce concours, nous passons d’un jury d’une dizaine de personnes à 124 acteurs issus du monde de la Tech, des médias, de start-up, d’institutionnels… Nous permettons également à nos étudiants et nos anciens élèves de voter. Cette opportunité nous permet de créer une dynamique plus puissante qu’en présentiel. Et c’est la raison pour laquelle le nouveau format de ces trophées perdurera après la crise.

Quid des journées portes ouvertes ?

 C’est la première fois que nous les avons digitalisées. Pour essayer de les moderniser davantage, nous avions une fois expérimenté de modéliser le campus de l’école en 3D mais le résultat était peu convaincant. Lorsque la crise a pris de l’ampleur, nous avons d’emblée pensé au streaming en live pour mener ces journées portes ouvertes. Cette approche nous permet aujourd’hui d’organiser une dizaine de conférences en ligne à propos de la scolarité à Epitech, du fonctionnement de l’école… La logique d’interaction sera différente puisque ces « live stream » regrouperont 15 personnes versus une centaine lorsqu’on mène ces conférences en présentiel. Ce qui va changer, ce n’est pas le degré de personnalisation des réponses, qui devrait rester similaire, mais la répartition du temps des étudiants, qui n’auront pas l’opportunité de visiter notre campus…

Le digital peut-il prendre le relai sur la visite d’un campus ?

Non, le digital ne remplace pas une visite physique d’un campus. Nous sommes conscients que c’est pourtant capital, pour les étudiants souhaitant intégrer une nouvelle école, d’appréhender son environnement, son état d’esprit, son ambiance de travail… et de vivre l’espace. Par contre, le digital prend le relai lorsqu’il s’agit d’échanger des informations sur une école. En permettant de partager, en temps réel, des documents et des liens URL, le digital offre même une expérience plus qualitative entre un professeur et un futur étudiant.

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