Au sein de l’Université de Bordeaux, Blandine Masselin a occupé pendant un an le poste d’ingénieure pédagogique à la direction de la documentation. Aujourd’hui elle est Cheffe de projets digital Learning chez un groupe international de formation à Paris.
Ingénieure pédagogique, cheffe de projets, conceptrice, scénariste et pilote de modules de formation qu’elle digitalise…Blandine Masselin a plusieurs cordes à son arc. En effet après avoir travaillé dans des fonctions marketing et commerciales dans différentes industries, elle s’est spécialisée dans la gestion de projets et conception de formations digitales. Rencontre
Quelle ingénierie pédagogique préconisez-vous pour l’année universitaire perturbée par la pandémie de la Covid 19 ?
Les universités en France ont fait le choix de l’hybridation des enseignements, c’est à dire mixer des enseignements à distance avec des enseignements en présentiel. En ce qui concerne le distanciel, il est important d’utiliser des dispositifs qui engagent les étudiants. Le neuroscientifique Stanislas Dehaene fait état des 4 piliers de l’apprentissage :
– L’attention : Selon moi, on peut attirer l’attention des étudiants en utilisant leurs codes, en adoptant un ton décalé, en offrant un contenu visuellement attractif, en variant les stimulis et activités, etc… Cela demande de bien connaître l’apprenant pour fournir un contenu qui non seulement va l’attirer mais aussi le « fidéliser ». Ce qui est bien avec le numérique, c’est qu’on peut être créatif
– L’engagement actif. On dit qu’un apprenant passif n’apprend pas. C’est encore plus vrai dans l’apprentissage à distance. Les webinaires, par exemple, sont des tueurs de motivation. Le numérique multiplie les possibilités d’engagement et de stimulation des méninges. Pour le travail collaboratif à distance, c’est au formateur/enseignant de proposer les outils adéquats et de planifier au maximum cette collaboration, pour qu’il y ait le moins de points de frictions possibles dans le parcours de l’apprenant.
– Le retour d’information. En traitant les données de l’apprenant, le numérique propose davantage de possibilités de personnaliser les parcours (adaptive learning) et les feedbacks.
– La consolidation. La répétition à intervalle régulier permet d’ancrer les apprentissages sur le long terme. Un certain nombre d’outils de l’edtech proposent à l’apprenant des activités de révision notamment via les notifications push de leurs smartphones.
Quelles tendances digitales pour l’éducation vous semblent les plus pertinentes?
Le social Learning, avec des dispositifs d’apprentissage coopératifs et collaboratifs, car nous devons préparer nos apprenants à ce qui les attend en entreprise. Mobiliser l’intelligence collective sur des cas concrets et correspondant aux aspirations professionnelles des apprenants !
Il y a également l’adaptive Learning : Avec les avancées en intelligence artificielle et traitement des données, on devrait pouvoir arriver à offrir un contenu d’apprentissage toujours plus personnalisé à chaque apprenant, tout en jouant sur les 4 piliers de l’apprentissage vus précédemment, et en s’affranchissant de certaines contraintes matérielles et humaines.
Comment voyez-vous l’avenir de l’enseignement chez vous ?
Il y a encore beaucoup de barrières à la modernisation des pratiques pédagogiques dans les établissements d’enseignement supérieur public français. Je suis peut être pessimiste mais je pense que la crise sanitaire va agrandir le fossé qui existe entre les établissements les plus réactifs, qui sauront s’adapter, et ceux qui auront les moyens de leurs ambitions, et les autres.
Néanmoins je pense qu’on assiste à l’accélération de la modernisation des pratiques, et que c’est une bonne chose, malgré ce contexte difficile.
Quels sont vos projets ?
Je me passionne pour l’apprentissage ludique, immersif et pour offrir une expérience mémorable, dans le bon sens du terme, à l’apprenant. Dans mon métier, j’essaye de faire le pont entre mon passé en marketing et mon présent en digital Learning. Je souhaite donc continuer à travailler sur des projets fun et immersifs, comme des serious games ou des dispositifs en réalité virtuelle qui offrent des éléments de surprise, pour vraiment parler d’expérience apprenante.
Cette année, j’ai travaillé avec 4 autres collègues sur un jeu sérieux (Back to the Bib) qui a été bien reçu par les étudiants et cette expérience m’a donné envie d’en apprendre plus en game design et UX (expérience utilisateur) appliquée aux jeux sérieux.
NB : Blandine Masselin tient à souligner que ses réponses n’engagent que sa propre personne et ne reflètent pas forcément les conceptions de l’université de Bordeaux ou de son nouvel employeur