Depuis octobre 2024, le groupe d’audit et de conseil Forvis Mazars dispose de son propre programme d’intelligence artificielle. D’ici 18 mois, les 5000 collaborateurs français bénéficieront d’une formation spécifique à leur métier. L’objectif est de faire de l’IA un partenaire dans la transformation des pratiques, selon Guillaume Ravix, directeur du développement des compétences.
Comment se décline le programme d’intelligence artificielle de Forvis Mazars ?
Dans le cadre de notre politique de transformation, nous avons mis en place une « Suite IA », un ensemble d’outils IA qui seront utilisés par nos collaborateurs au quotidien. L’enjeu est très fort car il s’agit de créer de la valeur pour nos clients en se saisissant des opportunités technologiques. En matière de formation aux usages, nous avons ainsi réuni des experts en interne : la direction IT, la direction de la transformation et les experts en développement des compétences. L’objectif était de créer une académie digitale que nous considérons comme un carrefour des apprentissages numériques. Dans cette académie digitale, il existe ainsi des parcours de formation à la data, au Web3, et maintenant à l’IA notamment générative. Sur les 18 prochains mois, nous souhaitons former l’intégralité de nos 5000 collaborateurs à l’IA.
Comment votre académie interne forme-t-elle les collaborateurs à l’IA ?
Pour les former, nous avons bâti un dispositif autour d’un triptyque. Premièrement, nous avons intégré dans notre parcours d’apprentissage des vidéos de micro-learning sur l’acculturation afin d’embarquer tous les publics et de développer l’employabilité de nos collaborateurs. Ici, l’objectif est de parler un langage commun autour de l’IA, de comprendre le fonctionnement des LLM et de développer un esprit critique autour des usages. Ensuite, nous avons construit une brique de « passage à l’action » via la mise à disposition d’outils qui permettent de s’entraîner sur l’écriture de prompts, de se servir de Copilot 365 (développé par Microsoft), de synthétiser des emails… Enfin, notre école proposera à nos consultants IT et data des modules d’approfondissement sur des thèmes plus pointus comme la création d’agents conversationnels, le développement de LLM…
Vous vous appuyez sur votre propre IA générative, construite en interne et appelée « MAIA ». Quelle est sa valeur ajoutée ?
Elle permet de traiter d’importantes masses de données et de générer des informations aux bornes de Mazars, c’est-à-dire des contenus qui restent en interne. Elle permettra en particulier de développer des cas d’usage métier. Parmi ces derniers figurent, pour les auditeurs financiers, la génération de rapports d’audit préliminaires et l’analyse de données financières importantes concernant les transactions. Là, l’IA nous permettra à la fois de structurer les rapports et de proposer des recommandations. L’avantage, c’est que nos auditeurs pourront se positionner sur des tâches d’analyses plus stratégiques, obtenir des scénarios de risques et détecter des schémas potentiellement inhabituels dans les transactions qui pourraient indiquer des erreurs, voire des fraudes. L’IA fera office de partenaire pour améliorer la détection d’anomalies.
Quels sont les autres cas d’usage de l’IA au sein du groupe ?
Nos consultants réalisent habituellement des synthèses de propositions commerciales et de livrables qui ont déjà été faites précédemment. Cela demande beaucoup d’engagement en temps. Grâce à l’IA, ces consultants pourront justement gagner beaucoup de temps pour générer des propositions commerciales. Les cas d’usage de la fonction RH et du développement des compétences concernent, quant à eux, la conception de protocoles pédagogiques. L’IA permettra de générer des déroulés, des synopsis de formation en présentiel ou en distanciel, des propositions d’orchestration de contenus… À une échelle plus micro, l’IA aidera aussi à proposer des icebreakers ou encore des quiz. Enfin, en matière de recrutement, elle aidera à mieux rédiger les offres d’emploi en trouvant des titres plus accrocheurs et en rendant plus attractives les job descriptions.
L’IA évolue très rapidement. Comment comptez-vous maintenir à jour les connaissances de vos équipes ?
Notre académie digitale est organisée autour de deux grandes instances. Le board, qui réunit les membres de notre Comex, donnera les orientations stratégiques de la formation à l’IA. Le comité de l’académie digitale, plus opérationnel, réunit quant à lui la direction de la transformation, celle de l’IT et du développement des compétences. Nous invitons aussi des experts autour de la table selon les thématiques que nous souhaitons creuser. L’ensemble de ces parties prenantes identifient les ruptures et les sujets sur lesquels il est essentiel d’anticiper des plans de formations. Par ailleurs, nous travaillons avec des start-up innovantes qui nous permettent d’adopter de nouvelles technologies. Enfin, nous continuerons de miser sur le reverse mentoring, qui permet aux associés d’être accompagnés par des collaborateurs plus jeunes et préalablement formés.