Élection de Donald Trump : quelles conséquences pour les EdTech ?

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Alors que le président américain Donald Trump a signé, le 20 mars, un décret pour éliminer le ministère de l’Éducation, élus démocrates, parents d’élèves et acteurs de la communauté éducative manifestent une grande inquiétude pour l’avenir de la société américaine. Que signifie cette décision pour le monde des EdTech, y compris européennes ? Éclairages.

Bien que l’éducation soit du ressort des États fédérés et des districts locaux aux États-Unis, la décision du président américain de démanteler le ministère de l’Éducation aura des conséquences graves sur la société américaine. En effet, c’est au niveau national que sont fixées les priorités en matière d’éducation, que sont protégés les droits civiques et que se décident les politiques d’aides financières aux établissements accueillant des élèves issus de milieux défavorisés.

Un impact incertain sur les EdTech

Pour la filière EdTech en revanche, il est difficile d’estimer les répercussions de cette décision. « Puisque ce sont les États qui fixent leurs propres politiques éducatives, il est difficile de savoir quel impact cette décision, si elle était approuvée par le Congrès, aurait sur le marché des EdTech », confirme Yannig Raffenel, fondateur du hub EdTech Grand Ouest. Un point de vue que partage Marie-Christine Levet, co-fondatrice d’Educapital. « Il est très inquiétant de couper tous les budgets de recherche en éducation et de cesser la centralisation des normes. L’impact sera très fort sur les étudiants en situation de précarité ou de handicap. Mais pour la filière EdTech, je ne crois pas qu’il y aura de graves conséquences parce que le marché américain était déjà très décentralisé, à la différence du marché français. Les solutions EdTech sont vendues soit aux districts, soit aux super districts, soit aux établissements. » En effet, à la différence de la France, ce sont les États fédéraux qui sont les acheteurs de solutions d’apprentissage et d’équipements technologiques en fonction des besoins de leurs écoles.

Quel impact pour les EdTech françaises ?

Cependant, la décision de supprimer le ministère de l’éducation américain pourrait avoir un impact économique important, par exemple sur la compétitivité des futurs travailleurs, l’endettement des étudiants… ou générer une tension entre les États riches et les États pauvres qui se verraient privés du soutien fédéral pour leurs écoles. « Le risque d’effet indirect existe. Si la situation économique se fragilise, cela se répercutera forcément sur le marché des EdTech. Car lorsqu’un État dysfonctionne, c’est très souvent l’éducation et la formation qui en pâtissent le plus », alerte Yannig Raffenel. Si la filière venait à se fragiliser, les EdTech françaises ou européennes implantées aux États-Unis et dépendantes de la croissance du marché américain pourraient subir des revers. « Certaines EdTech allemandes ou anglaises se sont développées sur ce marché. En France, elles sont très peu nombreuses. Aucune n’en dépend vraiment. Quant à celles qui réalisent une partie de leur chiffre d’affaires aux États-Unis, elles ne sont qu’une dizaine, les EdTech françaises ayant du mal à aller sur le marché américain ».

Des opportunités possibles

Peur du harcèlement scolaire, insatisfaction à l’égard de l’école, volonté de certaines familles de transmettre une éducation religieuse voire sectaire aux enfants… Le home schooling, qui consiste à scolariser les enfants à domicile, est une pratique légale qui devient une tendance forte aux États-Unis. Et celle-ci pourrait se renforcer si les écoles ne répondent plus aux standards de qualité en matière d’enseignement. Selon le Pew Research Center, 3,4 % des enfants du K-12 suivaient leur scolarité à domicile en 2023. « Si cette tendance venait à s’accroître, ce serait une opportunité pour les nouvelles start-up B-to-C qui proposent des outils aux parents ou des tuteurs personnalisés basés sur l’intelligence artificielle », constate Marie-Christine Levet. Selon elle, le modèle B-to-C est même préférable à la vente aux établissements. « Il existe environ 13 000 districts scolaires aux États-Unis contre 13 régions et 94 départements en France. Il faut donc une grande force de vente pour entrer sur le marché américain étant donné la pluralité des acteurs à convaincre », pointe-t-elle.

Le B-to-C est déjà un segment plébiscité par les EdTech américaines. Les Américains s’endettent massivement pour se former. « Demander aux individus de mettre de l’argent pour leurs études, c’est quelque chose qui fait partie de la culture américaine. Il y a donc beaucoup moins de dépendance à l’égard des structures gouvernementales et fédérales. Et cela commence dès les petites classes. Les particuliers sont donc nombreux à acheter des solutions EdTech. C’est aussi pour cela que les conséquences pour la filière devraient être très faibles. Mais nous devons, nous Français, tirer des leçons de la catastrophe à venir pour empêcher que cela puisse arriver sur l’Europe », conclut Yannig Raffenel.

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