Il a reçu le prix de l’innovation pédagogique de la Fondation EM Normandie pour ses approches d’enseignement innovantes intégrant impression 3D, réalité augmentée et réalité virtuelle. Josip Marić, professeur associé en systèmes d’information à l’EM Normandie, combine aussi théorie et pratique pour préparer ses étudiants aux enjeux du monde de demain.
Vous avez été récompensé par la Fondation EM Normandie pour vos approches pédagogiques. En quoi consistent-elles ?
Le prix que j’ai obtenu met en lumière mon approche de la fabrication additive (c’est-à-dire l’impression 3D) et des technologies de réalité augmentée et de réalité virtuelle dans le cadre de nos programmes d’études de Bachelor et de Master sur les campus de Paris, Dublin et Dubaï. Cette initiative s’inscrit dans la politique de notre école de suivre attentivement les tendances de la numérisation dans l’éducation. Pour moi, le défi était de savoir comment adapter l’impression 3D, la réalité augmentée et la réalité virtuelle dans les salles de classe avec des étudiants qui ne sont pas nécessairement formés à ces technologies. Mon approche a consisté à adapter les théories existantes dans les domaines de l’innovation ou des systèmes d’information – comme celles de la diffusion des innovations (DoI) ou de l’innovation de rupture – pour analyser les cas d’usage et discuter de leurs implications pour les entreprises et la société.
Quels bénéfices tirez-vous de l’usage de ces technologies en classe ?
La réalité augmentée et la réalité virtuelle sont utilisées pour des simulations et des formations spécialisées depuis un certain temps (à des fins militaires, dans des situations de sauvetage…). L’impression 3D est, quant à elle, présente depuis les années 1980 dans les chaînes de production (pour le prototypage, le moulage ou l’outillage). Cela dit, l’enseignement de ces technologies concernait les établissements d’enseignement supérieur orientés vers l’ingénierie et la technologie plutôt que vers les disciplines commerciales et de gestion. Le défi pour moi était de savoir comment adapter les technologies d’impression 3D et RA/VR dans le programme de cours et de montrer à nos étudiants le potentiel de ces technologies pour l’entreprise et la société. La solution a été de s’appuyer sur les cadres théoriques existants dans les domaines de l’innovation et des systèmes d’information, où les étudiants ont eu des expériences pratiques dans la manipulation de ces technologies en classe. Ces expériences leur ont permis de comprendre les cas d’usage actuels, de discuter des disruptions liées à ces technologies ainsi que de leurs limites.
Qu’en est-il de l’expérience étudiante ?
En termes d’apprentissage, j’observe une satisfaction accrue des étudiants à l’égard de l’expérimentation de ces technologies. L’esprit de bricolage et l’approche interactive par la pratique ont suscité, chez eux, un fort intérêt pour les devoirs. Ils ont également pris plus d’initiatives pour résoudre des problèmes commerciaux grâce à ces technologies (en lien avec l’identification et la couverture de cas d’utilisation de l’impression 3D et des technologies de réalité augmentée et de réalité virtuelle en temps réel par l’industrie ou les entreprises). Par ailleurs, en étant exposés à ces dernières, les étudiants ont été immédiatement intrigués par la question de l’objectif général des usages dans les entreprises modernes. Les caractéristiques de durabilité de ces technologies ont également été mises en lumière lorsque les étudiants avaient pour mission de discuter des problèmes socio-environnementaux liés à leur usage.
Selon vous, quelle doit être la place de l’intelligence artificielle dans l’enseignement ?
Notre civilisation est marquée par l’utilisation des technologies depuis la préhistoire. Nous pouvons observer divers artefacts technologiques (outils en pierre, armes médiévales, imprimerie, locomotives, l’électricité, smartphones à l’ère moderne…) apparaissant à différentes époques de l’évolution humaine. Ce n’est pas différent au 21e siècle avec l’avènement des technologies numériques. Celles-ci permettent de nouvelles innovations et imposent un rythme de changement sans précédent à notre société. L’IA, ou plutôt un groupe de divers systèmes et modèles d’IA, suscite beaucoup d’intérêt chez les chercheurs. Le défi pour les établissements d’enseignement supérieur est d’avoir des objectifs pédagogiques clairs en lien avec l’adoption de l’IA. Ils doivent aussi savoir comment s’adapter au rythme des changements provoqués par l’IA et comment garantir que la prochaine génération d’étudiants dispose des compétences nécessaires pour travailler avec l’IA. La réponse n’est pas simple, et comme dans le cas de notre adaptation de l’impression 3D et de l’AR/VR dans le contexte des disciplines commerciales et de gestion, la seule approche raisonnable est d’accepter que le changement technologique soit en train de se produire et qu’il est nécessaire d’en étudier les cas d’utilisation actuels.