Et si on se souciait enfin du bien-être des enseignants ?

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Améliorer le climat scolaire suppose non seulement de prendre en compte le bien-être des élèves, mais aussi de leurs enseignants. À l’occasion d’une table ronde organisée en novembre dernier par Réseau Canopé et Assurances GMF, trois expertes ont témoigné des actions mises en œuvre dans les établissements pour y parvenir.

Pour que les enseignants puissent améliorer leur bien-être professionnel, encore faut-il qu’ils puissent s’appuyer sur des collectifs comme leurs pairs et les institutions. L’académie deCréteil accompagne sous forme de mission pédagogique un groupe de travail et de réflexion dédié à ces sujets. « Ce groupe de partage accompagne les parcours de formation des enseignants afin que chacun d’eux puisse trouver des modules liés aux compétences psychosociales, tout en cheminant à son rythme », explique Bénédicte Hare, inspectrice pédagogique à l’Académie. Selon elle, c’est lorsque les adultes ont développé leurs propres compétences psychosociales qu’ils sont à même de pouvoir les transmettre à leurs élèves. « Nous les accompagnons à assurer ce type de transfert au sein de leur classe dans le cadre de séquences pédagogiques spécifiques », assure-t-elle. Le collectif qu’elle pilote, le BCR (bienveillance, coopération, réussites), provient d’un besoin du terrain : il regroupe des personnels (enseignants, CPE, infirmières, inspecteurs, chefs d’établissement) désirant bénéficier de temps de formation, mais aussi rencontrer des collègues poursuivant les mêmes objectifs.

Faire évoluer les pratiques des enseignants

L’évolution des pratiques suppose ainsi que les enseignants se sentent « sécurisés » en amont. « Nous leur présentons les apports de la recherche ainsi que les textes institutionnels afin qu’ils puissent faire évoluer leurs pratiques de manière encadrée », souligne-t-elle. Pour Christine Schuhl, éducatrice de jeunes enfants, adopter des pratiques enseignantes intégrant la notion de « sécurité affective » passe par un changement de posture sur des questions comme le jugement, les étiquettes. Les notions de « bien-traitance » et de « douce violence », qui ont été analysées au sein des formations qu’elle a pilotées, aident les personnels de l’éducation à identifier les difficultés qu’ils rencontrent et, par conséquent, à faire bousculer leurs pratiquesau profit d’une meilleure empathie vis-à-vis des enfants. « En prenant la réalité de notre environnement, nous avons filmé « à hauteur de regard d’enfant » des cours de récréation, des salles afin de mieux prendre en compte leur perception des espaces. Ces mises en pratique nous ont aidés à réinterroger nos postures, à décortiquer le quotidien des enfants et à mieux appréhender la question du transfert du bien-être », témoigne-t-elle.

Libérer la parole des élèves

Autre démarche fructueuse pour les enseignants : libérer la parole de leurs élèves au cours de séquences de classe dédiées. C’est ce qu’a expérimenté Emmanuelle Colas-Micheli, enseignante de SVT en collège à l’académie de Créteil. « Comprendre que nous sommes tous des êtres humains traversés par des émotions est un long cheminement. À l’issue de ce processus, qui doit s’appuyer sur le soutien des pairs, une autre relation avec les élèves et les collègues peut s’ouvrir », explique-t-elle. Si elle s’est longtemps focalisée sur le séquençage méthodique de son cours, l’enseignante a constaté qu’une telle « rigidité » n’aidait pas à développer le bien-être collectif en classe. « L’actualité et les faits de société, par exemple l’attentat du Bataclan, font entrer des émotions dans les salles de classe. Les élèves arrivent avec des questionnements, des appréhensions… Cela nous oblige à trouver des ressources pour les aider à réguler ces moments de colère ou de stress. » L’enseignante s’est ainsi appuyée sur des temps d’échange (conseils d’élèves, classes coopératives, travaux de groupe) pour encourager ses élèves à réguler leurs émotions tout en cultivant leur intelligence collaborative. « Mon objectif est de construire, avec eux, une pensée critique. Cela leur permet de développer également leurs compétences cognitives et de mieux s’approprier les apprentissages. »

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