Arts et Métiers clôt un projet ambitieux de jumeaux numériques

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Figurant parmi les 17 projets d’établissements retenus en 2021 dans le cadre de l’appel à manifestations d’intérêt Demoes, le projet JENII (Jumeaux d’enseignement numériques immersifs et interactifs) virtualise des espaces industriels réels. Porté par Arts et Métiers, le CEA, le CNAM et le CESI, il est arrivé à son terme à la fin du mois de juin. Le bilan de Véronique Favier, directrice adjointe de l’ENSAM en charge du projet.

À quoi ressemblent les activités immersives proposées par les JENII ?

Elles consistent à explorer des environnements industriels à travers des casques de réalité virtuelle ou sur des plateformes numériques, c’est-à-dire devant un écran à la manière d’un jeu vidéo. La plupart des cas d’usage s’intègrent dans des travaux pratiques, l’étude de procédés de fabrication… Les étudiants utilisent alors un jumeau numérique pour se familiariser avec des procédés industriels. Par exemple, le campus d’Aix-en-Provence abrite une fonderie basse pression. Grâce au jumeau numérique, les étudiants réalisent des expériences de fonderie, conçoivent des moules destinés à la coulée de métal et les fabriquent à l’aide de l’impression 3D. Globalement, sans que l’on soit arrivé à un stade de maturité des usages, un tiers de nos étudiants ont pris part aux démonstrations réalisées sur tous les campus. Le CESI, de son côté, a uniformisé les usages de jumeaux numériques à l’ensemble de ses étudiants via de petites séquences pédagogiques. Le CNAM a, quant à lui, opté pour la création d’un jumeau numérique d’un laboratoire de chimie pour former aux gestes professionnels.

Quel bilan dressez-vous de ces expérimentations ?

L’avantage de ces dispositifs est que les étudiants peuvent réaliser des expériences complexes autant de fois qu’ils le souhaitent, avec la possibilité de se tromper en toute sécurité. Leur intérêt réside également dans l’accélération des procédés (la construction d’un moule par exemple), qui dure plusieurs jours dans la vie réelle, mais seulement une demi-heure au sein d’un jumeau numérique. En immersion, les étudiants « entrent » dans le moule, voient le métal liquide se solidifier et peuvent, en temps réel, modifier la température et voir comment la solidification varie en fonction de ce paramètre. Cette rapide vue d’ensemble de la chaîne de fabrication est très appréciée par les étudiants, car elle est moins décousue que dans un environnement réel. Globalement, les travaux de recherche menés pendant quatre ans ont abouti à la constitution d’une boîte à outils complète comprenant notamment une plateforme de conception de jumeaux numériques, un campus virtuel, des exemples concrets de jumeaux numériques de systèmes industriels réels.

Ces jumeaux numériques permettent-ils aux étudiants de mieux apprendre ?

Concevoir des jumeaux numériques permet en tout cas de repenser la pédagogie, d’intégrer davantage les étudiants, de mieux les briefer sur les acquis d’apprentissage attendus, de les rendre plus actifs… Cependant, l’un des enseignements que nous retenons est que l’immersion complète n’est pas nécessaire. En effet, des doctorants ont mis au point des méthodes d’évaluation de ces nouveaux dispositifs. Ils ont testé quatre médias différents : un simple PowerPoint, un jumeau numérique avec clavier-souris, un jumeau numérique en immersion totale et des travaux pratiques en environnement réel (dans une usine, par exemple). Ce qui en ressort est que la mise en application des connaissances est optimale dans les environnements réels, et non virtuels. Toutefois, le numérique, qui est également très efficace pour s’approprier les gestes, permet de réduire les coûts énergétiques, de répéter plusieurs fois une même expérience et de décloisonner les expériences entre les différents campus.

Quelle suite allez-vous donner à ce projet ?

Nous souhaitons diffuser nos environnements d’apprentissage à l’ensemble de nos promotions, dans tous nos campus. Nous garderons donc nos jumeaux numériques avec pour objectif d’en donner l’accès à tous les enseignants. Par exemple, le jumeau numérique de l’atelier de forgeage du campus de Metz, qui est un équipement très lourd, pourra être utilisé dans le campus de Paris, qui n’en dispose pas. Au-delà de nos campus, nous souhaitons diffuser les usages de jumeaux numériques dans le cadre de nos actions d’acculturation menées dans des lycées professionnels, des IUT… Enfin, nous poursuivrons les expérimentations des JENII dans le cadre du projet ConfluencES. Porté par le CNAM, il vise à réinventer les lieux de formation grâce à des environnements pédagogiques immersifs et hybrides. Parmi ces derniers figurent les Evolutive Learning Factories de l’ENSAM, qui sont des « usines-écoles » conçues pour que les futurs diplômés s’adaptent aux technologies de demain.

 

 

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