Arts et Métiers immerge désormais ses étudiants dans des environnements industriels connectés. À travers ses « Evolutive Learning Factories », l’école crée des « usines-écoles » conçues pour que les futurs diplômés s’adaptent aux technologies de demain. Retour d’expérience donné à l’occasion du salon Learning Technologies France 2025.
L’école Arts et Métiers a pour vocation de former aux métiers de l’industrie à travers ses 8 campus et ses 14 sites ancrés dans les territoires. Depuis les années 2010 et l’avènement de la quatrième révolution industrielle – celle de la digitalisation – l’école accompagne ses étudiants à la transformation de l’industrie. Elle forme ses apprenants à la fois par la théorie et la pratique : elle prend par exemple des initiatives permettant aux étudiants d’acquérir des compétences techniques en robotique, en automatisation, en IA et en industrie 4.0… « C’est dans ce contexte qu’Arts et métiers renforce ses formations dans des environnements à la fois réels et immersifs au travers de ses « Evolutive Learning Factories »(ELF). Il s’agit d’usines-écoles dont le but est d’adapter en continu les pratiques pédagogiques à l’évolution technologique », a expliqué, au cours d’une conférence tenue au Learning Technologies France, Véronique Favier, directrice générale adjointe de l’école.
Des mises en situation représentatives de l’industrie
À Arts et Métiers, la formation par la pratique se déroule sur des plateformes technologiques réelles qui contiennent des systèmes industriels grandeur nature. « Nous avons de vraies fonderies, de vraies presses de forge… », illustre-t-elle. Mais depuis 2021, l’école veut transmettre ses expertises de la plus rapidement à ses étudiants. « L’idée est de les immerger dans l’innovation afin qu’ils en soient acteurs, car les technologies d’aujourd’hui ne sont pas celles de demain. Par ailleurs, nous disposons de plateformes technologiques coûteuses. Via notre projet, nous souhaitons les upgrader. Le programme vise donc à réorganiser nos plateformes en une usine-école connectée », précise-t-elle. Concrètement, les ELF permettent d’immerger les étudiants à travers des mises en situation représentatives du monde industriel et des enjeux de transition. Les plateformes technologiques comprennent des chaînes de conception, de production et d’approvisionnement. « Ce que nous souhaitons aussi, c’est que nos étudiants puissent expérimenter la technodiversité : des approches low-tech pour concevoir des systèmes réparables en circuit court, et des dispositifs plus high-tech, automatisés, robotisés, pilotés via la science des données de l’IA », ajoute Véronique Favier.
Des expérimentations dans chaque campus
Chaque campus va ensuite décliner son ELF selon son tissu industriel régional et les expertises de ses laboratoires. Sur son campus de Paris, qui dispose d’une expertise de recherche en biomécanique humaine, l’école a par exemple mis en situation les étudiants dans le contexte de l’accessibilité dans le sport, pour faire écho aux Paralympiques d’hiver de 2030. « Ils prennent le rôle d’un ingénieur de société qui fabrique des dispositifs médicaux. Ils doivent, dans ce cadre, réaliser un dispositif permettant aux personnes en situation de handicap de pratiquer le snowboard grâce à une prothèse de genou innovante », explique-t-elle. Puisqu’ils sont répartis en groupes, les étudiants se lancent dans un challenge compétitif au sein de l’ELF. Ils découvrent ensuite les différents métiers de la conception, dessinent la pièce en CAO (conception assistée par ordinateur), la dimensionnent avec des méthodes de calcul adaptées jusqu’à arriver au premier prototype. « Une fois cette étape validée, ils passent en immersion dans la chaîne de production en fabriquant de vraies prothèses avec les machines de production que nous avons au sein de l’école. Ils réalisent ensuite des tests, d’abord sur des personnes sans handicap, puis sur des personnes en situation de handicap. »
Le “learning by doing” en toute sécurité
L’ELF du campus d’Aix-en-Provence a, quant à elle, permis à des étudiants de réaliser des expériences de fonderie, notamment de concevoir des moules destinés à la coulée de métal et de les fabriquer à l’aide de l’impression 3D. Cette expérimentation a été réalisée dans le cadre du JENII (Jumeau d’enseignement numérique, immersif et interactif). Un projet lancé en novembre 2021 et qui a été retenu dans le cadre de l’appel à manifestations d’intérêt Demoes (Démonstrateurs pour l’enseignement supérieur). L’avantage de ces dispositifs est que les étudiants peuvent réaliser ce type d’expériences autant de fois qu’ils le souhaitent, avec la possibilité de se tromper en toute sécurité. Mais cela signifie-t-il vraiment qu’ils sont plus sereins une fois confrontés à des machines réelles ? « Le passage aux vraies machines, avec leurs odeurs et leur chaleur est toujours complexe. Mais nos expérimentations leur donnent confiance puisqu’elles sont un temps d’entraînement renouvelable, contrairement aux TP », conclut-elle.