La « cogni’classe » vue par une enseignante de collège

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La « cogni’classe » est un dispositif pédagogique fondé sur les sciences cognitives qui vise à réduire les inégalités scolaires. Son ambition est d’insuffler une implication active des élèves afin qu’ils puissent mieux réutiliser leurs connaissances. Exemple concret d’une pratique mise en place par une enseignante d’histoire-géographie.

Le concept de cogni’classe est porté par Jean-Luc Berthier, spécialiste des sciences cognitives de l’apprentissage et président de l’association « Apprendre et former avec les sciences cognitives ». C’est un dispositif pédagogique dont les cinq axes d’exploration sont l’attention, l’implication active des élèves, la mémorisation, la compréhension et la métacognition (qui consiste pour les élèves à évaluer ce qu’ils font, à prendre du recul sur leur façon de raisonner). La cogni’classe a été expérimentée par Marie Perrody, enseignante d’histoire-géographie au sein du collège Courteline, qui a commencé à s’y former en 2020. « Le concept de cogni’classe se met en œuvre dans le cadre d’une coopération pédagogique entre enseignants qui souhaitent mettre en commun des outils validés scientifiquement pour apprendre à apprendre. Dans mon équipe, nous nous sommes basés sur l’un des domaines d’exploration d’une cogni’classe, à savoir la mémorisation », explique-t-elle.

Des fiches mémo pour « se poser des questions »

Cette enseignante met en place des « fiches mémo » qui permettent aux élèves de s’approprier individuellement la pratique de la mémorisation active en classe. Concrètement, ses séances s’ouvrent sur une problématique. Les élèves, en début de cours, se posent des questions à propos de leurs connaissances déjà existantes et de ce qu’ils souhaitent apprendre pendant le cours. « Il s’agit de réactiver les acquis existants et de mettre les élèves en projet afin qu’ils s’impliquent de façon active. Ensuite, je distribue des fiches mémo qui contiennent des questions et des réponses. Et je leur demande de dessiner un indice entre un mot et une définition. Cela permet de développer la compréhension en créant des rappels de mémoire. Car pour dessiner quelque chose de correct en rapport avec une définition, il faut d’abord l’avoir comprise. » Ainsi, les élèves se posent des questions et vérifient la réponse plutôt que de lire leur cours sous forme de texte.

Se concentrer sur l’essentiel

En sélectionnant l’essentiel, le professeur met l’accent sur ce que les élèves doivent absolument retenir. « C’est l’essentiel du cours qu’il faut transformer en questions. Je prépare également des fiches corrigées que je rends accessibles sur une plateforme comme Pronote », souligne-t-elle. Enfin, l’enseignante réalise des « tests de réactivation » d’une dizaine de minutes, espacés tout au long de l’année pour permettre la consolidation des connaissances mémorisées. Pour les élèves de sixième, Marie Perrody met en place une autre manière de réactiver les connaissances en plus de la fiche mémo. « J’utilise avec eux un carnet de bord : à la fin de chaque cours, le soir, ils doivent indiquer ce qu’ils ont fait et appris en classe. Ils posent ensuite deux questions sur le cours, qui feront l’objet d’échanges pendant la séance d’après. » L’idée ici est de ritualiser la mémorisation active à l’oral, en salle de classe.

Une meilleure rétention de l’information

Marie Perrody applique maintenant cette démarche à toutes ses classes. « Je n’ai pas de résultats validés scientifiquement. En revanche, je constate qu’il y a une meilleure implication des élèves. Et que ces derniers comprennent qu’il est nécessaire de réactiver leurs connaissances. D’autre part, en 2024, les 6e ont passé un test final sans avoir révisé sur tout le programme de l’année. La moyenne de la classe était de 71 % de réussite. » S’il ne peut, à lui seul, résoudre la problématique du décrochage scolaire, le dispositif aide en particulier les élèves désireux de progresser mais qui rencontrent des difficultés à s’approprier leurs cours sous forme de texte. Le compte rendu du collège Courteline pour l’année 2023-24 montre en tout cas que 41 % des élèves de 6e qui ont expérimenté ce dispositif « ont travaillé sérieusement et sont satisfaits de leurs résultats » et que plus de 60 % d’entre eux ont jugé la fiche mémo « plutôt utile ou très utile ». « C’est la raison pour laquelle je souhaite de nouveau déployer, l’année prochaine, la cogni’classe pour travailler sur d’autres aspects comme le bien-être des élèves et la coopération. Mon objectif est de les accompagner dans le développement de leurs compétences psychosociales », conclut-elle.

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