« 8 salariés sur 10 réclament une IA respectueuse de l’être humain », Christophe Liénard (Impact AI)

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Engagé depuis 2018 pour le déploiement d’une intelligence artificielle responsable, le collectif Impact AI a présenté, le 14 janvier, les résultats de son « Observatoire de l’IA responsable ». Menée en novembre 2024 auprès de 1000 salariés du secteur privé, l’étude révèle notamment que 80 % d’entre eux réclament une IA responsable. Les éclairages de Christophe Liénard, président d’Impact AI.

Quels sont les objectifs de l’Observatoire de l’IA responsable ?

Impact AI est un collectif qui a été créé en 2018. Composé de 85 entreprises (dont Orange, Bouygues, La MAIF…), start-up et écoles, il s’intéresse à l’impact de l’intelligence artificielle sur la santé, l’éducation, le travail. En plus de produire des études, nous organisons des masterclass qui réunissent plusieurs acteurs (chercheurs, académiciens…) dans l’objectif de réfléchir aux grands enjeux de l’IA, notamment en matière de gouvernance et d’éducation. Notre observatoire – une étude menée par Viavoice – GCF pour AI Impact – publié en janvier analyse la façon dont les salariés perçoivent le déploiement de l’IA dans leur entreprise, les opportunités et limites de cette technologie et leurs réactions face à l’enjeu de l’IA responsable.

Quels en sont les principaux enseignements ?

L’étude, révèle que 8 salariés sur 10 réclament une IA respectueuse de l’être humain, de son bien-être et de ses droits. Pourtant, lorsqu’ils ont été invités à situer sur une échelle de 1 à 10 la mise en place d’une IA responsable dans leur entreprise, 50 % des salariés se sont arrêtés à 4. On voit aussi que le rôle de l’IA dans le développement et le rayonnement d’un pays est considéré comme important par 52 % des salariés, ce qui est considérable. Ce chiffre grimpe à 74 % chez les salariés qui recourent à l’IA dans un cadre professionnel ou qui indiquent avoir été sensibilisés à l’usage de l’IA. D’ailleurs, il faut souligner qu’il existe une différence importante de perception entre ceux qui n’utilisent pas et ceux qui utilisent cette technologie. Ces derniers ont une vision beaucoup plus positive de l’IA que les autres.

Les salariés sont-ils suffisamment informés sur les questions de régulation de l’IA ?

Oui, et ils sont même 74 % à considérer qu’il est nécessaire de réguler le développement de l’IA – 37 %, jugent que c’est « tout à fait nécessaire ». Chez les utilisateurs de l’IA, ce chiffre s’élève à 85 %. On remarque ainsi qu’il existe a un fort consensus sur la question de la régulation. À ce titre 57 % des salariés considèrent l’AI Act (le règlement européen de l’IA) comme une bonne chose, avec une proportion plus importante auprès des utilisateurs de l’IA dans un cadre professionnel (75 %). Enfin, 44 % des salariés appellent de leurs vœux la mise en place d’une surveillance de l’IA.

Seuls 9% des salariés indiquent pouvoir se référer à une charte éthique dans leur entreprise. Pourquoi ?

Ils sont aussi seulement 9 % à indiquer qu’il existe dans leur entreprise un interlocuteur ou un comité éthique concernant l’IA. Ces chiffres témoignent d’un défaut de communication des entreprises vis-à-vis de leurs salariés sur les questions d’éthique et soulèvent l’importance de mettre en place un système d’éducation et d’information des salariés ainsi que des plans d’action. C’est d’autant plus important que la confiance accordée à l’IA responsable s’inscrit dans un contexte international où la France, aux yeux des salariés, doit progresser en regard des grandes puissances mondiales. Les salariés estiment en effet que les principaux gagnants en matière d’IA sont les États-Unis (44 %) et la Chine (34 %). La France n’arrive qu’au cinquième rang des gagnants (19 %).

Quels sont les freins à l’acculturation à l’IA en France ?

Les salariés savent que les technologies (IA, réalité virtuelle…) permettent de construire de meilleures stratégies d’entreprise, mais également des programmes de formation plus intuitifs, plus délocalisables… Mais si l’usage de l’IA dans la formation n’a pas été spécifiquement abordé dans le cadre de notre étude, on note un grand besoin de formation à l’A. Malgré cela, des obstacles ont été pointés du doigt. Les salariés estiment que les freins à l’acculturation à l’IA responsable en entreprise sont le manque de compétences internes (30 %), la complexité technique de l’intégration de l’IA (26 %) ou encore le manque de sensibilisation aux enjeux de l’IA (23 %).

Qu’attendez-vous de la publication de ces résultats ?

Ce que je constate, c’est que les entreprises, passée la phase de découverte des IA génératives, sont en train d’accélérer dans la construction et le déploiement de cas d’usage. L’événement lors duquel nous avons présenté les résultats de notre observatoire a été labellisé par le Sommet pour l’action sur l’IA, qui aura lieu à Paris au mois de février. Pour toutes ces raisons, nous sommes certains que notre observatoire va permettre d’alimenter les réflexions des gouvernants qui vont se réunir au Grand Palais. Ils ont maintenant des éléments chiffrés et concrets pour alimenter des politiques de construction d’une IA véritablement responsable et respectueuse des données personnelles.

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