À l’Université d’Angers, l’avenir est dans l’hybridation des enseignements

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Avant l’apparition de la crise du Covid-19, l’Université d’Angers avait déjà mis en place une structure d’ingénierie pédagogique, le Lab’UA. Conçu comme un service d’appui à la pédagogie universitaire, il intègre aujourd’hui une vingtaine d’ingénieurs pédagogiques qui accompagnent les enseignants dans la transformation de leurs pratiques. Les explications de Stéphane Amiard, vice-président numérique et patrimoine.

Lorsque les enseignements ont subitement basculé à distance, l’Université d’Angers était-elle prête à se lancer dans le numérique ?

Dans le cadre de notre projet Lab’UA qui consiste à réussir la transformation pédagogique par le numérique, nous essayons, depuis 2012, de nous rapprocher d’un ratio, en vogue au Québec, qui prévoit un ingénieur pédagogique par tranche de 1000 étudiants. Dans notre université qui compte 25 000 étudiants, 22 ingénieurs pédagogiques font aujourd’hui partie de l’équipe. Grâce à eux ainsi qu’à des financements de l’État, dont le projet « Nouveaux cursus à l’université », qui nous ont été octroyés de 2012 à 2018, nos unités de formation ont été outillées pour affronter la crise et adopter les usages du numérique. La crise sanitaire a toutefois été un accélérateur de développement de compétences spécifiques en vue du déploiement à grande échelle des outils de l’EdTech.

Comment le corps enseignant a-t-il vécu cette étape ?

Puisque nous disposions déjà de structures capables d’accompagner la mise en place de pratiques pédagogiques hybrides, le passage au distanciel n’a impacté que les enseignants qui n’avaient pas encore développé de compétences spécifiques en la matière. Par ailleurs, la difficulté de la transition a différé selon les unités de formation, les pratiques d’enseignement, les modalités d’évaluation propres à chaque communauté d’enseignants… Le basculement a, en revanche, été assez simple à prendre en charge pour les collègues « innovateurs » qui ont, depuis longtemps, compris que la maîtrise de l’éducation numérique était en train de devenir un outil stratégique d’attractivité des parcours de formation, en particulier les Masters. Nous avons mis au service des enseignants des moyens humains et financiers afin qu’ils apprennent à maîtriser l’usage des plateformes collaboratives. Parmi elles, Microsoft Teams, en tant qu’outil d’échange et d’organisation de classes virtuelles, et Moodle, en tant que plateforme centralisée de ressources de formation. Ces deux dispositifs, qui étaient déjà intégrés à nos systèmes d’information depuis 2016, ont été « musclés » pour pouvoir accueillir jusqu’à 2000 connexions simultanées.

Comment se sont déroulées les évaluations à distance ?

La crise a impulsé plusieurs changements en matière de pratiques évaluatives. Une partie des évaluations a été réalisée en asynchrone via des dépôts de devoirs sur Moodle, de manière à ce que les évaluations plus stratégiques soient réalisées en synchrone. Des QCM en ligne ont ainsi été réalisés en présence de plusieurs centaines étudiants en simultané. Cela a notamment été le cas pour les grandes cohortes d’étudiants, en droit ou en psychologie. Par ailleurs, les professeurs ont été incités à évaluer leurs étudiants sur leurs capacités de résolution de problématiques plutôt que sur la restitution des acquis. En effet, le profil d’un étudiant ne peut désormais être évalué qu’en conjuguant des examens à distance, des épreuves en présentiel, des rapports d’activité ou encore des entretiens oraux, en visioconférence.

Quelles leçons avez-vous tirées de la crise pour la prochaine rentrée universitaire ?

La crise nous aura fait gagner en compétences et en équipements. Nous continuerons à investir dans le développement des plateformes et des outils que nous avons déjà mis à disposition des professeurs via notre Lab’UA. Nous poursuivrons notre démarche d’accompagnement des enseignants à la demande et de sécurisation des nouvelles pratiques d’enseignement. Ce sera ensuite à l’enseignant de voir, selon les particularités de sa discipline et des niveaux de formation, s’il est utile de poursuivre leur déploiement à grande échelle. À la rentrée, le présentiel fera son grand retour. Il y aura ensuite une période de rééquilibrage qui, par un effet de balancier, aboutira à la généralisation de l’hybridation des activités d’enseignement. Les formations en Licence, destinées à attirer et fidéliser les étudiants en Master, ainsi que celles qui sont dédiées à des apprenants en reprise d’études y sont particulièrement adaptées. Nous constatons enfin que la plus-value pédagogique des cours magistraux est de plus en plus faible. Par conséquent, l’enjeu majeur sera d’identifier avec précision les temps forts qui nécessitent du présentiel.

Qu’attendez-vous de l’écosystème des EdTech pour l’avenir ?

Nous avons, à plusieurs reprises, participé à des réunions organisées par l’association EdTech France, notamment sur la question de l’hybridation des plateformes comme Moodle. Nous avons d’ailleurs porté un projet co-financé par le MESRI, « Moodle plus », consistant à démontrer l’intérêt d’agréger des services numériques issus de l’EdTech à une plateforme Moodle classique. L’objectif est d’obtenir un haut niveau d’intégration d’outils permettant de flexibiliser les formations et les contenus pédagogiques. Au sein du Moodle de l’Université d’Angers, un certain nombre de produits EdTech ont ainsi été insérés, à l’instar du système de votes interactifs Wooclap. Nous espérons y intégrer davantage d’outils EdTech comme des plug-in non-natifs ou de nouvelles fonctionnalités.

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