« La gratuité des MOOC n’est plus de mise »

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Même si l’Institut Mines-Télécom a une longue d’expérience en matière de production de MOOC, il désire désormais se tourner vers des modalités plus souples de formation en ligne. Les éclairages de Delphine Lalire, responsable programme MOOC & digital learning.

Comment l’usage des MOOC a-t-il essaimé au sein de l’IMT ?

Nous avons récemment publié une rétrospective en lien avec l’usage des MOOC au sein de l’IMT. Elle vise à valoriser l’investissement de nos équipes dans l’innovation pédagogique car la production de MOOC à l’IMT a été impulsée, dès 2013, par des initiatives individuelles d’enseignants et d’ingénieurs pédagogiques. En effet, le pionnier des MOOC en France est un enseignant-chercheur de l’IMT Atlantique, Jean-Marie Gilliot, qui a participé à l’élaboration des premiers MOOC francophones. Grâce à cette initiative et au soutien que lui a apporté notre direction générale, il a insufflé une dynamique d’essaimage globale au sein de l’ensemble de l’institution. D’ailleurs, dès 2014, le développement des MOOC a été inscrit dans le plan stratégique de l’IMT et, à la faveur d’une convention de mécénat signée avec la fondation Patrick et Lina Drahi, nous avons pu apporter un soutien systématique aux autres enseignants qui ont souhaité se lancer dans cette aventure. En 2015, l’institution proposait une dizaine de MOOC dans son catalogue. Nous en comptons aujourd’hui 60, en anglais et en français, déployés sur 3 plateformes : FUN-MOOC, Coursera et edX.

Quels usages l’IMT développe-t-il ?

Un autre enseignant pionnier en matière d’innovation, Baptiste Gauthier, a produit, en 2014, le premier ensemble de MOOC sur le thème de la fabrication numérique. Ces cours hybridés intègrent des sessions d’apprentissage dans des « fab lab » physiques destinés à la réalisation d’activités basées sur l’usage d’imprimantes 3D, de cartes Arduino… Cette hybridation permet ainsi un accompagnement des étudiants dans la prise en main d’outils interactifs. D’autres initiatives ont concerné la mise en place de classes inversées sur la base de MOOC en vue de faire des temps présentiels un espace consacré à l’approfondissement de notions mal comprises. Les dispositifs d’enseignement en ligne ont également été utiles aux collègues qui doivent assurer des heures d’enseignement sur d’autres campus. Enfin, pour des publics plus larges, nous avons produit un ensemble de MOOC sur la programmation en langage C dans le cadre d’un parcours qui permet l’obtention d’un professional certificate, aujourd’hui reconnu par de grands comptes comme Nokia. Le parcours a été développé en partenariat avec l’université américaine Dartmouth et compte, à ce jour, plus de 400 000 inscrits.

Les MOOC semblent aujourd’hui relativement dépassés… 

En effet, le MOOC présente quelques limites. D’abord, ce format manque de souplesse à la fois pour les enseignants dans la conception et pour les apprenants dans leur « consommation » des contenus. La gratuité des contenus – le « O » de Open signifiait implicitement « gratuit » – n’est globalement plus de mise. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’IMT expérimente les MOOC sur trois plateformes distinctes. Sur FUN-MOOC, nous privilégions le modèle gratuit, qui permet à nos cours d’être connus et appréciés dans des régions comme l’Afrique francophone. Cela nous permet de renforcer notre rayonnement et notre mission de service public. Sur les plateformes mondiales comme Coursera et edX, le modèle est différent puisque la majorité des cours sont certifiants : les apprenants peuvent choisir de payer pour accéder à la formule certifiante ou d’accéder à des contenus limités mais gratuitement. Sur Coursera, une partie de nos cours sont utilisés en B-to-B par des entreprises qui veulent donner accès à des contenus sur étagères à leurs salariés pour se former.

Allez-vous continuer à produire des MOOC dans les prochaines années ?

Oui, l’IMT continuera de développer des contenus gratuits, notamment pour sensibiliser à la transition écologique et accompagner l’orientation des lycéens ou les révisions des étudiants en classe préparatoire. Notre présence sur FUN-MOOC, Coursera et edX permet également de donner de la visibilité aux travaux de nos enseignants-chercheurs. Cela reste donc intéressant, d’autant que nous avons la chance de pouvoir financer la production de MOOC dans le cadre de notre convention de mécénat qui dure jusqu’en 2024. Mais, nous nous tournons de plus en plus vers d’autres modalités grâce au savoir-faire de l’IMT en matière de jeux sérieux et de projets en réalité virtuelle. Nous déployons ainsi la VR depuis 2021 dans le cadre de la sensibilisation des étudiants et des personnels aux violences sexistes et sexuelles. Nous avons également organisé, cette année, un forum de la transition écologique qui a plongé les étudiants de toutes les écoles dans un exercice de design fiction sur le thème « l’ingénieur et le vivant ». Enfin, nous avons mis en place un « sprint de prototypage » de formations professionnalisantes et d’offres d’accompagnement innovantes sur l’industrie du futur dans le cadre d’un projet financé par la Banque des territoires.

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