« La verticale EdTech n’existe pas au CES de Las Vegas »

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Nanaba, Soft Kids, Hypnoledge… Au total, une quinzaine d’EdTech françaises se sont rendues au CES de Las Vegas, la grande messe de l’électronique et des technologies qui s’est déroulée début janvier. Yannig Raffenel, co-président d’EdTech France était lui aussi du voyage. Il partage son bilan d’une édition fortement perturbée par la pandémie.

 Quel bilan tirez-vous de cette édition 2022 ?

Comme les plus grosses entreprises avaient annoncé qu’elles ne viendraient pas cette année, beaucoup de surfaces d’exposition étaient vides au sein du salon. Par ailleurs, il y avait beaucoup moins de visiteurs que les années précédentes : 40 000 en 2022 versus 170 000 en 2020. Mais paradoxalement, ceux qui étaient présents étaient des décideurs très qualitatifs et vraiment motivés pour faire du business. Le bilan de l’édition est quand même très bon : les acteurs de l’EdTech ont visiblement noué de très bons contacts. Parmi les 2300 entreprises présentes, dont 800 start-up, 140 étaient françaises, ce qui fait de la France la première délégation, juste devant les États-Unis et la Corée puis, loin derrière, avec seulement une dizaine d’entreprises, d’autres pays comme l’Angleterre.

La filière mondiale de l’EdTech était-elle bien représentée ?

Contrairement à la Smart City ou à la HealthTech, la verticale EdTech n’existe pas au CES. Au global, une trentaine d’entreprises évoluant sur ce marché étaient présentes. La bonne nouvelle, c’est que la moitié d’entre elles étaient françaises, l’autre étant coréenne. Au regard de leurs compères, les sociétés hexagonales ont une approche assez différenciante : Hypnoledge se positionne sur l’apprentissage des langues étrangères par l’hypnose, Tinycoaching édite un coach professionnel virtuel doté d’une interface vocale, Private Discuss propose une solution de visioconférence intégrée qui est cybersécurisée et souveraine, Pozzz commercialise une pochette éducative connectée qui récompense les enfants en fonction de leur temps passé sans écran…

Quelles nouvelles tendances avez-vous vu émerger ?

Je n’ai pas vu de tendances vraiment nouvelles émanant, par exemple, d’autres pays. La réalité virtuelle et augmentée poursuit son chemin : la vraie nouveauté est l’émergence de plateformes d’édition et d’exploitation de contenus qui s’adressent à la fois aux audiences en présentiel et en distanciel. Par ailleurs, des acteurs spécialisés dans le métavers émergent : leur offre ne ressemble plus à des jeux comme c’était jusqu’ici le cas mais devient plus réaliste, avec des avatars sous forme de photos. Pour autant, je reste assez dubitatif sur le sujet du métavers : cela consomme beaucoup de bande passante et suppose des équipements comme des casques VR qui ne sont pas encore à la portée de tous. Le lancement de la lunette « Apple Glass » pourrait toutefois favoriser leur adoption.

Quel est votre acteur « coup de cœur » ?

Il s’agit d’un acteur coréen qui s’appelle Wayne Hills Ventures et qui édite un outil de création de vidéos à partir de texte. Concrètement, la solution analyse la syntaxe d’un texte et propose des séquences vidéo à partir de ses mots-clés. Le panel de fonctionnalités est ensuite large : il est par exemple possible d’incruster le texte d’origine au sein de la vidéo, d’insérer une voix off… C’est une solution qui pourrait constituer une petite révolution pour les organismes de formation qui produisent leur contenu, mais aussi pour les entreprises et les établissements de l’enseignement supérieur. Pour autant, elle est à utiliser de manière frugale : aujourd’hui, l’enjeu des acteurs de la formation et de l’éducation est davantage de créer des activités pédagogiques que des contenus, qui existent déjà.

Quelle est votre ambition pour l’édition 2023 ?

Notre objectif est de créer une identité EdTech via la remise de prix aux start-up, l’organisation de pitch… Avec nos partenaires, nous pourrions même imaginer créer un village francophone dédié à l’EdTech ainsi qu’une « learning expedition » pour découvrir d’autres pratiques et partager les nôtres. Car comme le Canada et la Corée du Sud, la France est à l’origine d’innovations en matière d’ingénierie pédagogique, notamment grâce à sa connaissance des neurosciences. Notre autre point fort, c’est notre transversalité et notre altérité. Lorsque nous réfléchissons à l’apprentissage, nous avons une approche complète de l’humain et nous prenons en compte ses dimensions psychologiques. En France, former c’est d’abord s’intéresser à l’autre et c’est une vision qu’on nous envie à l’échelle mondiale.

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