« Les jeunes veulent faire des choix de carrière par conviction, non par défaut », Frédéric Voyer, My Job Glasses

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Réseautage, orientation, construction de projets… Le champ des interactions professionnelles, dans lequel My Job Glasses réalise une véritable percée, suscite beaucoup d’engouement chez les jeunes. Pour Frédéric Voyer, fondateur de cette plateforme de mentorat, l’enjeu est d’autant plus important qu’ils sont encore très nombreux à faire des choix de carrière par défaut.

Quelles lacunes avez-vous constaté dans le domaine de l’orientation avant de créer votre société ?

C’est mon parcours qui a inspiré la création de la société. Issu d’une école d’ingénieurs, j’ai travaillé pendant 8 ans dans les assurances en tant qu’actuaire. À la trentaine, je suis passé par un moment de crise de sens qui m’a fait comprendre que mon métier ne correspondait pas du tout à mes aspirations, qu’il était le fruit d’un choix par défaut. Ma situation, loin d’être isolée, m’a fait comprendre qu’il existait des insuffisances en matière d’orientation et une absence de ponts faisant rencontrer des professionnels inspirants et des jeunes. Ces derniers veulent faire des choix de carrière par conviction, non par défaut. D’où la naissance, en 2015, de My Job Glasses, qui facilite les interactions entre les 15-30 ans avec des professionnels d’entreprise et des mentors engagés. Notre cadre de découverte de métiers et de mentors se veut un moyen de susciter des vocations qui soit plus qualitatif que celui des forums étudiants.

Comment avez-vous développé votre entreprise ?

Mon associé et moi avons été accompagnés, en 2016, par l’incubateur HEC Paris et par Wilco, un accélérateur d’innovation. Nous avons également été lauréats de l’association « Réseau Entreprendre » Paris en 2018. Ces trois expériences qualitatives nous ont été d’une grande aide pour le développement de notre outil. Plus tardivement, nous avons suivi le programme « Graduate » au sein du campus parisien de start-up Station F. Notre réseau de professionnels s’étend aujourd’hui sur 130 pays et compte 50 000 professionnels de plus de 3000 entreprises. Notre plateforme est déployée par 200 écoles et universités se situant en France, en Europe, au Madagascar…

Quel est  votre modèle économique ?

Nous avons préféré que notre concept ne dépende pas de subventions d’État car dès le début, nous portions l’ambition de développer une société à impact de dimension européenne, voire mondiale. Puisque nous poursuivons des objectifs sociétaux d’inclusion, nous ne faisons payer ni les jeunes ni les écoles ou les universités qui déploient My Job Glasses. Le modèle est donc payant pour les entreprises. Les professionnels inscrits sur notre plateforme sont, à 90 %, des bénévoles qui y trouvent un moyen de créer des connexions qualitatives. 10 % des professionnels s’adressent à nous via leur entreprise dans le cadre de mise en place de programmes de mentorat. Nous offrons à ces entreprises la possibilité d’allier l’humain et la technologie pour piloter des programmes de mentorat visant à attirer et fidéliser leurs collaborateurs. De façon générale, les mentors des entreprises clientes agissent sur leur « marque employeur » en se connectant avec des jeunes, en générant des recrutements… Mais également en augmentant leur « valeur RSE » puisque, même sans recruter, ces entreprises s’engagent activement pour allouer du temps à la jeunesse et valoriser l’inclusion.

Plusieurs plateformes d’orientation existent aujourd’hui en France. Quelle est votre spécificité ?

Nous nous différencions par notre double offre de mentorat externe (l’outil permet aux entreprises de suivre l’activité des mentors au sein de notre communauté ouverte de jeunes) et interne. Avec le second format, nous mettons à disposition des entreprises un « My Job Glasses interne » qui permet de fluidifier les interactions entre les communautés de collaborateurs et de faire passer le mentorat à l’échelle. Enfin, nous sommes une sorte de TOEIC de l’orientation : depuis 2 ans, nous délivrons des certificats d’orientation aux jeunes et les établissements peuvent se créer un compte spécifique pour suivre les interactions de leurs étudiants et ainsi mieux connaître les métiers qu’ils visent.

Quel a été l’impact de la crise du Covid-19 ?

Nous en avons ressenti l’effet dans l’écosystème global au sein duquel nous évoluons : le secteur des EdTech a gagné 5 ans d’accélération dans les écoles et les entreprises. Celles-ci prennent conscience de la nécessité d’accélérer leur digitalisation. Puisque toutes les interactions humaines ont été coupées, notre solution a été utilisée comme un moyen de contournement permettant de susciter de nouvelles mises en relation. C’est, enfin, pour répondre aux contraintes des confinements que nous avons développé notre nouveau business de mentorat interne.

Comment comptez-vous élargir votre champ d’action ?

Nous avons un grand projet de refonte de notre application pour l’année 2022. Nous prévoyons d’y intégrer de nouvelles fonctionnalités et de la faire passer en version mobile. Le projet s’inscrit dans une volonté d’élargir le périmètre d’utilisation. La plateforme ne sera plus uniquement réservée aux 15-30 ans mais à tous les publics qui se sentent concernés par l’orientation et la formation tout au long de la vie. L’idée est de massifier les interactions humaines et de réinventer la manière dont on se constitue des réseaux professionnels qualitatifs avec des personnes engagées dans l’égalité des chances.

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